Les souvenirs d’une serveuse.
FORMATION POITRAS
Aujourd’hui le 5 Janvier, nous célébrons un bien triste anniversaire souvenir. Celui de la grande crise du verglas de 1998. Plusieurs restaurants étaient demeurés ouverts pour la totalité de cette crise, dont celui où je travaillais…..Je vous raconte…
J’avais à l’époque 33 ans et je venais tout juste de recommencer à travailler comme serveuse pour un restaurant qui servait des petits déjeuners. Tout un virage ! J’avais déjà exercé ce métier auparavant quand j’étais étudiante au collège et comme je venais de subir une abolition de poste, ce fût donc tout à fait naturel pour moi de retourner à mes anciennes amours!
J’habitais Chambly à l’époque et je travaillais à St-Luc, mais pour le bonheur d’avoir une horaire de jour, ca ne me dérangeais pas du tout de voyager l’autoroute 35 tôt le matin à tous les jours……. sauf ce matin la!!!
J’ai été chanceuse quand même, j’avais de l’électricité à mon réveil et j’ai donc pu me préparer pour aller travailler ! Prévoyant le coup, je décide d’apporter avec moi quelques effets personnels dans le but d’aller dormir chez mon amie qui demeurait à Saint-Jean-sur-Richelieu, qui était pas mal plus proche de mon lieu de travail. Pas question de me tapper la patinoire 35 une autre fois, déjà que c’était assez périlleux comme chemin, ouf !! Les décors étaient féériques par contre ! Ma première journée de travail se déroula à merveille! On a eu une affluence plus élevée et tous les clients étaient bien heureux que nous étions ouverts car certains d’entres eux, n’avaient déjà plus d’électricité. J’ai terminé mon travail un peu plus tard, mais tout était parfait étant donné les circonstances. La consolation fût assez rapide avec les pourboires qui étaient au rendez-vous !
La deuxième journée, comme j’étais plus près de mon travail, ce fût parfait ! Quelle bonne idée j’ai eu! Il y avait de l’électricité au réveil, mais très tôt celle ci est partie. Au restaurant, il en avait encore, mais de plus en plus de gens n’en avaient plus. Tout allait encore bien et nous répondions à la demande.
La troisième journée, j’étais toujours chez mon amie et l’électricité avait fait quelques soubresauts , mais la, il en avait plus et nous sentions que la situation devenait de plus en plus catastrophique. Nous commencions à voir les poteaux électriques tomber et il mouillait encore. Nous nous disions, ouf, l’électricité ne sera pas rétablie de si tôt, encore au moins 5-6 jours certain…….. Au pire, on sort le kit à fondu, on s’habile chaudement et nous sommes ok! Finalement, ca duré 30 jours !
Le restaurant où je travaillait possédait une cuisinière au gaz et s’était porté acquéreur d’une génératrice. Nous pouvions préparer quelques repas chauds et avions accès à un petit frigidaire. Le menu était devenu beaucoup plus restrain. Une seule viande de disponible par jour pour les déjeuners car s’approvisionner devenait évidement de plus en plus difficile à cause de toutes les routes fermées mais également qu’il fallait avoir de la place dans le petit frigo de survie. Les clients étaient de plus en plus nombreux, les travailleurs d’hydro et de la route s’ajoutaient désormais à la file d’attente. Toutes les tâches devenaient également plus ardues. Le plancher était toujours mouillé et devait constamment être essuyé par sécurité, pour répondre à l’achalandage qui arrivait et repartait aussi vite afin de retourner à la maison. Pas trop de réchaud de café non plus ! Il fallait faire bouillir de l’eau dans un gros chaudron sur la cuisinière au gaz, c’était assez long merci comme procédé ! Même chose pour laver la vaisselle…..
Les journées se sont succédées sans électricités, puis tranquillement l’espoir disparaissait. C’était constamment plein au restaurant et nous comme employés, étions aussi des sinistrés et commencions royalement à être brûlés. Nous vivions également un manque de sommeil et avions froid. Nous avons été témoins de l’essence profonde des gens dans les pires situations. Le désarrois, l’incompréhension, la rage, l’abus, l’escroquerie, la peur, la fatigue et la faim ont tous siégés dans notre restaurant. J’ai servi certains clients incompréhensifs, exigeants et sans empathie. Travaillé avec des collègues à fleur de peau. Des chicanes pour des niaiseries aussi ! Une chance, j’ai heureusement eu le grand bonheur de voir également le meilleur coté des gens. De l’entraide, du partage ainsi que de la reconnaissance pour le bon service et les repas chauds. Nous étions une source de grand réconfort et de compréhension pour plusieurs d’entres eux et c’est ce côté que je garde en moi comme meilleur souvenir.
Après plusieurs jours, il a fallu que j’abandonne. Je devais désormais aller m’abriter à l’école secondaire de Chambly, ville de ma résidence, pour terminer une semaine plus tard à Montréal chez l’un des fils de mon conjoint de cette époque qui nous avait gentiment offert le gite. Seul le personnel muni de four à bois ou de génératrice à la maison pouvait se présenter au travail par la suite. L’uniforme, le beau maquillage et la coiffure, fallait oublier cela! Ils ont eu un travail colossale !
Ce fût une période très éprouvante. Souvent, le fait de côtoyer des gens aussi nombreux dans un moment si horrible et hors de contrôle, fait ressortir des facettes de l’être humain qui ne sont pas toujours joyeux à observer. Heureusement, il y a toujours les bons samaritains pour sauver la mise ! Plusieurs entreprises furent exemplaires et très généreuses. Elles ont aidé grandement les sinistrés. Encore aujourd’hui comme à chaque année le 5 janvier, je me souviens !
© Lyne Poitras 2018.
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